ÉCRITURE
J’écris comme je lis : quand j’écris, plus rien d’autre n’existe.
Madame André
Madame André
Madame André, un livre illustré, Madame André, une dame âgée. Elle devient transparente à force d’être isolée, de manquer de contacts physiques. La transparence commence par sa main. Elle apprend que son fils, cette année, ne viendra pas lui rendre visite : la transparence se répand dans tout son corps. Sans jamais être dessinée, elle se meut entre réalité concrète (illustrée aux feutres noirs), souvenirs (au café) et émotions, sensations (en couleurs). Le texte, en prose, voyage entre solitude, tristesse, colère, joie et absurde pour une ode à la tendresse.
Le centre de l’univers, c’est le livre illustré. C’est de là que tout naît, que tout prend forme. Madame André s’y déploie, son histoire se déplie. A partir de ce socle fictionnel, le hasard m’a ouvert des portes : en 2022, Madame André, fiction sonore, est diffusée dans l’émission Par Ouï Dire, sur la Première, RTBF.
Je suis actuellement en création pour le livre illustré Madame André et en phase de recherche (ateliers philo-art en classe pour voir comment les ados s’emparent de la thématique) et de préproduction (La Roseraie, le CC Chênée, EKLA, ITHAC, Philocité,… sont enthousiasmés par le projet) pour un spectacle autour de la fiction Madame André.
Le Tintamarre des gastéropodes, Mathilde Collard, Les éditions Novelas, 2017, pp. 24-25
Un roman noir, cynique, absurde.
Un père déprimé
La recherche d’un enfant kidnappé le jour de son anniversaire.
Des policiers fantasques
Un tueur d’escargots
Un grand-père pyromane
Et des bilboquets.
Interview pour Novelas asbl : https://www.youtube.com/watch?v=cZRWL2lhlSU
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Piscine – Extrait
Immergée dans l’eau, il n’y a pas de monde. Tu peux pas me parler, je peux pas te répondre. L’étendue est plate, mes yeux sont clos. J’avance. Des p’tits ronds dans un grand carré. Stupides longueurs. Je mets la vie en bocal. Si la tête en sort, ce n’est qu’une décision : ouverture d’yeux et grande inspiration. Je suis à deux pas de la noyade. Mon corps reçoit l’immense étreinte aqueuse. De mes orteils à ma bouche, j’étouffe. Ici, il n’y a ni vie ni pesanteur. Je flotte au-dessus du vide, je m’endors dans un vaste décor de chlore. Avancer ou couler. Avancer et couler. Je m’écoule et l’eau se tait. Je me débats pour avancer. Mes bras fouettent et repoussent l’eau. Toujours plus loin. L’eau m’encercle, toujours plus loin. Encore quelques mètres, toujours plus loin, elle me guette toujours plus loin. En elle j’suis toujours toujours perdue et j’suis toujours toujours toujours au même endroit.
Enlace-moi. Casse-toi. Bouge-moi. Bouge pas.
L’eau a tout compris. Elle reste elle part elle me suit je m’y enfouis. Si je la goûte elle m’avale. Je vole sans filet dans une solitude sale, quelle belle excuse ! pour pas répondre je reprends pas de souffle – alibi d’apnée. Quelques secondes, encore quelques secondes, juste quelques secondes – alibi d’apnée. Simuler une urgence d’eau pour pas te parler – alibi d’apnée. Le temps que tu t’égosilles, alibi d’apnée, le temps que tu partes d’ici, alibi d’apnée. Alibi d’apnée ! […]
Café froid – Extrait
Un café
C’est pour toi
Un café
C’est pour moi
Mon café
Je le bois
Ton café
Tu l’bois pas ?
Ton café
Pas pour moi
Le café
C’est pour toi
Je l’bois pas
Tu fais quoi ?
Tu bois pas ?
[…]
Seuls les fous gèrent – Extrait, Les mots en héritage 2, Recueil collectif, Edition Novelas, 2017, pp. 8-9
Dans le désert, désert de pierre, une fille vit.
Fille née d’elle ne sait qui, elle ne sait où, elle ne sait quand.
Pas de parents.
Elle a les mains calleuses et les mollets coupés. Ses cheveux capturent la crasse depuis des lustres, elle n’a aucune conscience du temps. Une robe opaque la cadenasse et la comprime, elle ne l’a jamais retirée. Elle n’a jamais pensé qu’elle pouvait se dénuder. Avec la saleté, épiderme et vêtement ne font qu’un, c’est collé. Comme une fougère sur une piquante plaie, l’habit s’infiltre dans sa peau. Le sang coagule et referme le tissu dans les entailles : la robe est verrouillée dans son corps mutilé. Si elle l’enlevait, sans aucun doute, elle s’éplucherait. La fille n’a pas de nom, le paysage est sec, aride et rocailleux. Il n’y a que des fougères, des scorpions et des oiseaux.
[…]
Plat au curry – Extrait
SCENE I – CAFE ROSETTE – Rosette, Coraline, Carl.
Coraline est seule dans le café. Elle s’ennuie, passe le temps comme elle peut.
Rosette : Café ? A l’habitude ?
Coraline : Oui, comme d’habitude.
Rosette : Du sucre ?
Coraline : Non. Merci.
Rosette : Un p’tit spéculoos ? T’aimes bien les p’tits spéculoos.
Silence, Coraline s’ennuie.
Coraline : C’est la pentecôte aujourd’hui ?
Rosette : Tu connais mes horaires, mais pour le calendrier, rien à faire… Tu te situes comment ? Le dentiste ? Le loyer ? C’est le seize janvier. Il serait de bon ton de souhaiter la bonne année.
Coraline : Aujourd’hui, ça sonne férié… Il n’y a personne. Personne. (Silence.) Rosette ? (Silence.) Personne.
Silence, Coraline s’ennuie.
Rosette : Le café tout chaud tout fort.
Coraline : Et le spéculoos ?
Rosette : Pas de spéculoos. Fini ! Terminé ! Y a pus, i pleut, les clients vont arriver. Pas le temps d’aller au Supermarché. – Lève tes coudes, toi, tu salis la table avec ton gras de bras. Toutes ces tables à torcher, ces biscuits à racheter, ces sous à compter, ces sourires à…
Coraline : Rosette ? Il n’y a personne. Personne. Juste moi.
Rosette : Prends le torchon, nettoie les taches de bière par terre.
Carl entre.
Rosette : J’te sers quoi ?
Carl : Une bière.
Coraline (à elle-même) : Une bière, paf ça gicle. Les mouches crèvent, elles collent sur le parquet.
Carl : Rosette, c’est quand la dernière fois que t’as été dire salut à ma daronne ? Depuis la dernière éternité.
Rosette : Je suis l’amie, pas la fille. (Silence) Tu veux que je fasse quoi ?
Carl : Tu la remets comme avant. Quand elle me disait « Mange tes crêpes avec des couverts, tu iras partout dans la vie ». Avant la baise, le deal et les flics. Quand j’étais poli.
Rosette : Ce temps-là a trépassé.
Carl : Je veux le retrouver, la retrouver.
Rosette : Ta mère, elle est pas perdue dans un p’tit coin du Café Rosette, j’te l’dis. – Laisse-moi passer, je dois nettoyer la bière que t’as renversée. Ça colle, saloperie ! c’est du sucre, rien que du sucre fermenté. La bière, que je la serve que je la boive ou que je la cure, ça me grossit… quelle bataille… – Les spéculoos. T’as le temps d’aller me chercher des spéculoos ? Je te donne les sous.
Carl : On s’en fout des spéculoos, ‘y a ma mère qui se laisse crever ! Rosette, s’il te plaît, viens lui changer les idées. Demain ?
Rosette : Non. Non non non. J’ai trop de boulot, beaucoup trop.
Carl : Rosette, tu l’aimes bien Huguette.
Rosette : Je préfère mon café. Propre et bien rangé.